skis ferreol quebec canada 1

Jonathan Audet, co-fondateur de Ferreol

Ferreol est une jeune marque québécoise qui bouscule l’industrie du ski avec une approche unique : skis haut de gamme, pensés pour la polyvalence, soutenus par une forte expertise en ingénierie et un engagement écologique affirmé.
J’ai rencontré Jonathan Audet, co-fondateur et CEO, pour retracer l’histoire de la marque, de la naissance de Ferreol jusqu’à leurs ambitions internationales.

Entretien réalisé le 2 octobre 2025 avec Jonathan Audet.

Jonathan Audet
Jonathan Audet
co-fondateur et directeur R&D
Ferreol Ferreol

Alexis : La première fois que j’ai entendu parler de Ferreol, c’était à un Ski Show à Toronto, en début de saison. Il y a avait un stand et le nom Ferreol m’avait interpellé ! En tant que français, je n’avais encore jamais entendu parler de cette marque.

Jonathan : Justement, notre première palette arrive à Annecy dans les prochains jours. On a signé une entente avec Sport Pulsion pour la distribution d’équipements sportifs haut de gamme.

Et dès cet automne, nos skis seront disponibles au Vieux Campeur dans plusieurs magasins physiques comme Toulouse, Lyon, Grenoble, Sallanches et Paris notamment.

Alexis : Bonne nouvelle, il faut que j’aille voir ça !

La génèse de la marque entre passion et bricolage

Étienne s’était construit une presse à ski dans son garage. Félix avait bricolé un petit remonte-pente dans son jardin. De mon côté, avec mon frère on s’était fabriqué un canon à neige !

Jonathan Audet

Alexis : Comment est née Ferreol ?

Jonathan : Ce qu’il faut comprendre, c’est que les trois fondateurs avaient déjà chacun une histoire personnelle avec le ski, avant même de se connaître.

Étienne, qui est aujourd’hui responsable technique et R&D, s’était construit une presse à ski artisanale dans le garage de ses parents. Félix, plus orienté gestion, avait bricolé un petit remonte-pente dans son jardin.

De mon côté, avec mon frère, on s’était fabriqué… un canon à neige maison. Bref, on avait tous la même passion, poussée jusqu’au bricolage, à l’expérimentation.

C’était déjà un signe. Quand on s’est rencontrés, l’idée de fonder une vraie marque de skis a pris naturellement.

Alexis : Vous aviez de quoi ouvrir une mini-station de ski entre vous trois ! (rires)

Jonathan : Exactement ! Mais au-delà de l’anecdote, ça dit quelque chose : la passion était là depuis longtemps et on a toujours eu envie de comprendre comment ça marche, pas seulement de pratiquer.

L’ADN produit et la signature Ferreol

Jonathan : Dès le départ, on voulait des skis agiles, joueurs et très polyvalents.

Peu importe le modèle, on cherche ce même feeling : de la maniabilité et de la confiance en conditions réelles, que ce soit sur neige dure, glace, neige lourde, trafollée, sous-bois serrés, ventée…

Cette combinaison performance + écoresponsabilité nous a aidés à trouver notre place sur un marché très compétitif.

Alexis : Vous avez aussi une approche technique assez unique.

Jonathan : Oui. Après mon bac en génie mécanique, j’ai fait une maîtrise sur le comportement des skis alpins sur neige. Philippe, dans l’équipe depuis 4 ans, a fait une maîtrise sur la vibration des skis.

Cette double expertise est unique en Amérique du Nord et nous permet de repousser les limites : nouveaux concepts, nouvelles constructions et matériaux.

Les premiers succès

Alexis : À quel moment vous vous êtes dit : « on tient quelque chose, on persévère » ?

Jonathan : On a démarré il y a environ six ans, fin 2019. Aujourd’hui, on est la plus grosse compagnie canadienne de skis (en volume annuel de paires vendues). Au début, on avançait par itérations courtes : on lançait des tailles/modèles en quelques dizaines d’exemplaires avec des objectifs clairs, si ça vendait, feu vert pour la suite.

Les premiers modèles ont tout de suite marché, on a su qu’on tenait quelque chose.

Alexis : Une approche très « agile ».

Jonathan : Exact. Et on travaille de près avec les magasins : ça nous garde au contact des besoins réels et nous évite des erreurs.

La visibilité médiatique au Québec/Canada nous a aussi aidé. On a même participé aux versions québécoise et canadienne de l’émission « Qui veut être mon associé ? ».

all mountain ferreol explo 86
Ferreol – Explo 86

Pour qui sont les skis Ferreol ?

Alexis : Vos skis s’adressent à des experts, des skieurs créatifs, à des débutants ? Quelle est l’approche de gamme ?

Jonathan : Notre intention initiale était le haut de gamme pour skieurs avancés/experts.

Mais notre design joueur et tolérant a rendu les skis faciles à skier : on a donc conquis aussi les skieurs de niveau intermédiaire. Un même ski doit accrocher, rester stable et précis, avoir de la relance, mais aussi accepter qu’un intermédiaire « pousse de la neige » et laisse chasser le talon.

Le résultat c’est que pour les skieurs experts, il y a un sentiment de contrôle, confiance, de plaisir immédiat. Et dans le même temps, pour les skieurs intermédiaires, ils découvrent de nouvelles couches de comportement à mesure que le niveau monte.

C’est important, car le gros du marché est intermédiaire, souvent en quête de qualité sans vouloir un ski « expert » trop exigeant.

Alexis : Unisexes ? Rando ?

Jonathan : Tous nos skis sont unisexes. Et on en tient compte dans les longueurs et designs.

Beaucoup de modèles existent en approche mixte : touring/alpin.

Sur nos skis orientés freeride/poudre, environ 60 % des utilisateurs montent des tech bindings ou hybrides (comme la Shift), et enfin 40 % des alpines.

rando ferreol
Randonnée (a.alevesque)

Fabriqué au Québec et pensé pour l’impact

Alexis : Le « made in Canada/Québec », je pense que ça parle au public français.

Jonathan : Je le crois aussi. Tout est conçu et fabriqué au Québec, avec une énergie hydroélectrique. On source localement des matériaux clés comme les noyaux peuplier/érable à moins de 100 km de l’usine. Certaines résines sont biosourcées.

On travaille aussi sur des topsheets plus responsables. Selon nos analyses de cycle de vie, un ski Ferreol fabriqué au Québec et expédié en France par bateau peut avoir une empreinte carbone inférieure à un ski fabriqué en France, grâce au mix énergétique et aux matériaux.

Alexis : Intéressant, surtout dans un contexte où les clients accordent de plus en plus d’importance à l’origine, les matériaux et la recyclabilité.

Jonathan : C’est clairement une attente forte. On mesure nos impacts, on compense via des organismes locaux, et on conçoit pour la durabilité et l’adaptabilité à des conditions changeantes (neige plus lourde/mouillée, glace).

Un modèle d’ingénierie intégré unique

Alexis : Vous avez votre propre labo d’innovation ?

Jonathan : Oui, c’est rare pour une PME de ski. La plupart sous-traite l’ingénierie à l’usine.

Nous, on garde le contrôle : développement, modélisation, prototypage. L’usine de Rimouski au Québec est l’une des plus grosses d’Amérique du Nord. Elle ne porte pas sa propre marque, mais fabrique pour plusieurs marques nord-américaines et a investi dans des chaînes robotisées pour la constance et la qualité.

Leur force, c’est de produire des skis de qualité selon un cahier des charges.

De plus en plus de marques de ski/snowboard approchent Ferreol pour des services d’ingénierie : design et protos, puis industrialisation à l’usine avec un cahier des charges complet.

Notre démarche en 3 étapes :

  1. Ce que l’on veut sur neige (usage, marché, sensations recherchées).
  2. Propriétés physiques ciblées (géométrie, rigidités en flexion et surtout en torsion…). C’est l’étape la plus difficile pour beaucoup, et c’est notre expertise.
  3. Sélection matériaux/construction pour obtenir ces propriétés.

On s’appuie sur des modèles numériques (déformations, distributions de pression, points de faiblesse, analyses de fatigue). Résultat, on a moins de protos et une convergence plus rapide vers la version finale.

Un jour, un proto imprévu a révélé une nouvelle cambrure : trois appuis précis, un ski plus vivant, plus accrocheur. Le 3P était né !

Jonathan

Alexis : Une erreur marquante qui vous a fait progresser ?

Jonathan : Clairement, La cambrure en trois points !

Lors d’un proto, certains paramètres ont généré une cambrure inattendue. À l’essai, on a découvert des sensations nouvelles. On a alors compris et maîtrisé le procédé. Concrètement, au lieu d’une distribution de pression uniforme et usuelle sur la longueur du ski, on vient créer trois zones de haute pression : elles assurent le grip (edge-hold) tout en laissant le ski vivant et maniable, même avec une cambrure marquée. C’est devenu une signature sur des modèles comme le Pionnier.

Alexis : Une idée reçue que tu aimerais casser dans l’industrie ?

Jonathan : En magasin, on voit souvent des gens plier la spatule pour « évaluer » un ski. Or, ce que ressent le plus le skieur, c’est la rigidité en torsion, et personne ne tord un ski au shop !

Chez Ferreol, on met l’accent sur la torsion : on la calcule, on la prévoit, on la publie. On partage des courbes de rigidité (flexion/torsion) et ainsi rendre comparables les produits.

Le marché français et européen

Alexis : Symboliquement et stratégiquement, que représente la France ?

Jonathan : C’est une porte d’entrée vers l’Europe et une belle fierté de pouvoir travailler avec nos cousins français. Une fois les skis essayés, le bouche-à-oreille fonctionne vite.

La France peut devenir un vecteur de croissance important, avant de répliquer dans d’autres marchés alpins.

Futur du marché et des attentes

Alexis : Et les attentes des skieurs dans les années à venir ?

Jonathan : Les skieurs s’attendent premièrement à une véritable exigence environnementale. Avec mesure, réduction, compensation et choix de matériaux responsables. Dans un second temps, les skieurs cherchent des skis capables de s’adapter à des conditions très variables, de la neige lourde à la glace, ce qui correspond précisément à la polyvalence que Ferreol recherche dans ses modèles.

Alexis : Où vois-tu Ferreol dans dix ans ?

Jonathan : En acteur important qui inspire d’autres marques sur l’innovation et le développement durable.

Et au-delà du ski : avec Ferreol Technologies (notre deuxième société), on a dévelopé le Scalium, un alliage d’aluminium breveté que l’industrie qualifie parmi les plus résistants au monde. Par rapport à certains alliages aéronautiques/aérospatiaux, on observe jusqu’à +45 % de résistance.

D’un côté, les plus grands manufacturiers de skis au monde travaillent activement pour intégrer notre Scalium dans leurs propres skis commerciaux, et de l’autre côté, nous venons juste d’obtenir une subvention de l’Agence Spatiale Canadienne (ASC) pour poursuivre ces applications.

Cet alliage ouvre des pistes dans le sport (fixations rando, bâtons…), mais aussi l’aéronautique et l’aérospatial.

Alexis : Où voir/essayer/acheter en France ?

Jonathan : Au Vieux Campeur dès fin octobre 2025, puis d’autres shops vont suivre !

En savoir plus sur les skis Ferreol et l’entreprise Ferreol Technologies

skis ferreol saint laurent mont saint anne
Ferreol SL 74 en action à Mont Saint Anne, Québec.
Partagez
Annonceur

Vos commentaires et questions